Les biocarburants: une mauvaise solution pour décarboner l’aviation
Le secteur aérien fonde sa stratégie de décarbonation en partie sur les biocarburants et les utilise pour justifier la poursuite de sa croissance. Dans le cadre de son plan de décarbonation, qui vise la neutralité carbone en 2050, les émissions de CO21 de l’aviation ne commenceraient à véritablement décroître qu’à partir de 2035. Selon les projections de l’ONU, pour maintenir le réchauffement sous le seuil de 1,5 °C, il faudrait atteindre une réduction de 55 % d’ici 2030. Alors que les objectifs pour 2030 et 2050 sont indissociables, le secteur aérien ne s’engage que sur le plus éloigné car il se refuse à réduire son trafic dès maintenant, pourtant le seul moyen d’atteindre l’objectif de 2030. Bien au contraire, l’industrie souhaite continuer sa croissance, avec un doublement de la flotte mondiale d’ici 2050 (de 23 000 avions aujourd’hui à 43 000).
Tout récemment deux rapports commandités par l’aéroport d’Amsterdam-Schiphol montrent qu’une réduction d’au moins 30 % des émissions de CO2 est nécessaire d’ici 2030 (par rapport à 2019) pour que l’aéroport soit sur une trajectoire 1,5°C, même en considérant que le secteur aérien aurait droit à une part de budget carbone plus importante que les autres du fait de sa difficulté à décarboner. Cela implique de réduire plus ou moins fortement le nombre de vols, selon la proportion de long-courriers, qui émettent le plus de CO2.2
Dans sa contribution au cahier d’acteurs cité par la CNDP, le réseau international Rester sur Terre souligne que « la seule solution pour réduire rapidement les émissions de CO2, c’est de réduire le trafic.» Ils expliquent que les carburants d’aviation dits « durables », dont les biocarburants, arriveront trop tard, car on ne pourra pas en mettre plus que quelques pour cent dans les avions en 2030, alors que c’est maintenant qu’il faudrait mettre le paquet sur la décarbonation. Ils seront d’autre part en quantité très insuffisante, car ils reposent sur des ressources convoitées par d’autres secteurs répondant à des besoins plus essentiels de la société et les utilisant de manière plus efficace pour contrer le réchauffement climatique. La montée en puissance de la production d’électricité renouvelable, déjà ambitieuse, ne pourra satisfaire toutes les demandes, et la biomasse, fragilisée par le changement climatique, peine déjà à fournir ses clients traditionnels. Le transport aérien doit donc être limité à ses usages essentiels, au moins tant que les ressources renouvelables restent insuffisantes.
Les Français y sont prêts : selon un sondage réalisé pour BFMTV, « 59 % se disent prêts à encore moins prendre l’avion afin que la France fasse des économies d’énergie et 20% assurent qu’ils le font déjà. »3
- En outre, l’impact climatique des avions ne se limite pas au CO2. Les cirrus induits par les traînées de condensation ainsi que les dérivés des NOx ont un impact deux fois plus important que le CO2, impact que les carburants d’aviation soi-disant durables ne réduisent que très partiellement. ↩︎
- https://rester-sur-terre.org/aeroport-amsterdam-schiphol-rapport-preconisant-une-forte-baisse-du-trafic-aerien/ ↩︎
- https://www.bfmtv.com/economie/entreprises/transports/l-avion-a-de-moins-en-moins-la-cote-aupres-des-francais_AV-202311090110.html ↩︎
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